Guide Expert des Formats de Fichiers Livrables en Scan lidar
Introduction : Le Livrable, une Décision Stratégique au-delà de la Technique
Le choix d’un format de fichier à l’issue d’une prestation de relevé 3D et de modélisation (Scan to BIM) est trop souvent perçu comme un simple détail technique. En réalité, il s’agit d’une décision stratégique fondamentale qui conditionne le coût, la fluidité de la collaboration, la propriété des données et, in fine, la valeur à long terme du projet pour le client final. L’enjeu est de passer d’une conversation sur « quel fichier? » à une réflexion sur « pourquoi ce fichier? ». Pour ce faire, il est essentiel de comprendre où chaque livrable s’insère dans la chaîne de valeur du Scan to BIM.
Cette chaîne se décompose en quatre étapes clés :
La Capture : L’acquisition de la réalité sur site via des technologies comme le scan laser (LiDAR) ou la photogrammétrie.
Le Traitement : L’assemblage des scans, le nettoyage du bruit, la structuration et l’optimisation des données brutes pour former un nuage de points cohérent et exploitable.
La Modélisation : La transformation intellectuelle du nuage de points, qui est une donnée « brute », en objets intelligents et structurés au sein d’une maquette numérique (BIM).
L’Exploitation : L’utilisation des différents livrables pour des cas d’usage précis : conception architecturale, analyse structurelle, coordination technique, gestion et maintenance du bâtiment, communication, etc..
Dans ce contexte, le livrable n’est plus une simple finalité, mais un véritable actif numérique. Si le coût du scan est une dépense ponctuelle, la gestion d’un bâtiment est une charge récurrente sur des décennies. Un livrable intelligent, tel qu’une maquette BIM précise ou une visite virtuelle, se transforme en un « jumeau numérique » opérationnel. Cet outil permet une gestion proactive (préparation d’interventions à distance, simulation de travaux, audit énergétique) plutôt que réactive. Les économies récurrentes en temps, en matériaux et en réduction des erreurs de chantier qui en découlent dépassent alors largement l’investissement initial. Le consultant expert ne vend donc pas un « scan », mais un « outil de pilotage stratégique d’actifs ». Le choix du format de fichier détermine la pérennité, l’accessibilité et la puissance de cet outil.
La Matière Première – Les Formats de Nuages de Points
Le Nuage de Points : L’ADN du Jumeau Numérique
Le nuage de points est la représentation numérique la plus fidèle de la réalité capturée. Il s’agit d’un ensemble de millions, voire de milliards, de points, chacun défini par des coordonnées spatiales (x,y,z) et potentiellement enrichi d’attributs supplémentaires comme la couleur (RVB), l’intensité de réflectivité du laser ou des classifications. C’est l’ADN brut à partir duquel tous les autres livrables seront construits.
Cependant, un nuage de points « brut », issu directement de l’assemblage des scans, est souvent imparfait. Il peut contenir du « bruit » (points aberrants dus à des réflexions, des mouvements), des objets indésirables (personnes, véhicules) et une densité de points excessive qui alourdit inutilement les fichiers et ralentit leur manipulation. L’étape de traitement, qui consiste à nettoyer, structurer, classifier et éventuellement décimer (réduire intelligemment la densité) le nuage de points, est donc une phase à très haute valeur ajoutée. Elle transforme une donnée brute et lourde en une information propre, légère et parfaitement exploitable, garantissant la qualité de tous les livrables en aval.
Le Standard d’Interopérabilité : Le format.e57
Le format .e57
est un format de fichier ouvert, neutre et standardisé par l’ASTM International (norme E57), spécifiquement conçu pour le stockage et l’échange de données issues de la numérisation 3D. Il ne se contente pas de stocker les coordonnées des points ; il encapsule également les métadonnées de la capture (paramètres du scanner, positions), les informations de couleur et d’intensité, et, de manière cruciale, les images panoramiques à 360° prises depuis chaque station de scan.
Avantages Clés :
Interopérabilité et Pérennité : Étant un standard ouvert et non-propriétaire, le
.e57
garantit une compatibilité maximale entre les différents matériels (scanners Leica, Faro, Trimble…) et logiciels (Autodesk ReCap, Trimble RealWorks, CloudCompare…). C’est le format de choix pour l’archivage à long terme, assurant que les données resteront lisibles et exploitables dans le futur, même si les technologies actuelles évoluent ou disparaissent. Il est donc indispensable pour les projets patrimoniaux ou les maîtres d’ouvrage soucieux de la souveraineté de leurs données.Richesse des Données : L’intégration des panoramas 360° en fait bien plus qu’un simple nuage de points. Il constitue une « visite virtuelle brute » qui permet de visualiser le contexte de la capture et de comprendre des détails que les points seuls ne peuvent retranscrire.
Destinataires : Le client final (pour l’archivage et la propriété des données), les équipes projet multidisciplinaires utilisant des logiciels hétérogènes, les conservateurs du patrimoine, et tout acteur nécessitant un format d’échange fiable.
Le Standard Géospatial : Le format.las et sa version compressée.laz
Le format .las
(LASer) est un format de fichier binaire public, spécifié par l’American Society for Photogrammetry and Remote Sensing (ASPRS), qui s’est imposé comme le standard de l’industrie pour les données LiDAR. Conçu à l’origine pour les relevés aéroportés, il est parfaitement adapté à tous les types de données LiDAR terrestres. Sa spécificité réside dans sa capacité à stocker non seulement les points, mais aussi un système de classification standardisé (sol, végétation basse/moyenne/haute, bâtiment, eau, etc.) et des informations sur la trajectoire du capteur.
Avantages Clés :
Standard pour la Cartographie et les SIG : C’est le format de référence pour toutes les applications géospatiales, topographiques et pour l’intégration dans les Systèmes d’Information Géographique (SIG). La classification des points permet des analyses de terrain automatisées et très puissantes.
Compression Efficace : Le format
.laz
est une version compressée sans perte du.las
. Il réduit la taille des fichiers de 75 % à plus de 90 %, un atout considérable pour le stockage et le transfert de jeux de données qui peuvent atteindre des centaines de gigaoctets.
Destinataires : Géomètres-topographes, urbanistes, ingénieurs en génie civil, bureaux d’études en environnement, gestionnaires de réseaux, et tout client dont le projet s’inscrit dans un contexte territorial ou topographique étendu.
L’Écosystème Optimisé : Les formats.rcp et.rcs d’Autodesk
Les formats .rcp
et .rcs
sont des formats propriétaires développés par Autodesk pour son écosystème logiciel, notamment le programme de traitement de nuages de points ReCap.
.rcs
(ReCap Scan) : Ce fichier contient les données spatialement indexées d’une seule station de scan..rcp
(ReCap Project) : C’est un fichier projet qui ne contient pas les points lui-même, mais qui pointe vers un ou plusieurs fichiers.rcs
. Il organise l’ensemble des scans, leur recalage, les régions définies, et d’autres métadonnées. C’est ce fichier.rcp
que l’on attache dans les logiciels comme Revit, AutoCAD ou Navisworks.
Avantages Clés :
Performance dans l’Écosystème Autodesk : Ces formats sont hautement optimisés pour une manipulation fluide et performante des nuages de points, même très volumineux, dans les logiciels Autodesk. Grâce à l’indexation, le logiciel ne charge en mémoire que les points visibles à l’écran, ce qui améliore drastiquement la réactivité lors de la navigation et de la modélisation.
Gestion de Projet Simplifiée : Un unique fichier
.rcp
permet de gérer des dizaines de scans, simplifiant le partage et la gestion des liens au sein d’une équipe travaillant sur Revit, par exemple.
Inconvénients :
Format Propriétaire : Le principal inconvénient est son caractère de « boîte noire ». Il enferme les données dans l’écosystème Autodesk, limitant leur utilisation directe dans d’autres logiciels. Une conversion via ReCap est souvent nécessaire pour en sortir.
Destinataires : Les équipes (architectes, ingénieurs, dessinateurs) qui travaillent exclusivement ou majoritairement avec la suite logicielle Autodesk.
Synthèse Stratégique : Choisir le Bon Format de Nuage de Points
Le choix entre un format ouvert comme le .e57
et un format propriétaire optimisé comme le .rcp
n’est pas seulement technique, il engage la stratégie de données du client sur le long terme. C’est un arbitrage entre la performance immédiate et la souveraineté future des données.
Un architecte utilisant Revit pour un projet de rénovation bénéficiera sans conteste de la fluidité d’un fichier .rcp
pour son travail quotidien. Cependant, si ce projet est archivé uniquement sous ce format, que se passera-t-il dans dix ans lorsque le propriétaire du bâtiment souhaitera utiliser un nouveau logiciel de gestion de patrimoine non-Autodesk? L’accès aux données de base pourrait devenir complexe, voire impossible, dévaluant ainsi l’actif numérique pour lequel il a payé.
La meilleure pratique pour un consultant expert est donc de livrer une solution hybride. Il s’agit de fournir le fichier .rcp
pour l’efficacité opérationnelle immédiate du client dans son environnement de travail, et de l’accompagner systématiquement du fichier .e57
comme « master d’archive ». Ce dernier garantit la pérennité, l’interopérabilité et la pleine propriété des données brutes capturées, protégeant ainsi l’investissement du client sur le long terme.
Tableau 1 : Caractéristiques et Usages des Formats de Nuages de Points
Critère | .e57 (ASTM) | .las/.laz (ASPRS) | .rcp/.rcs (Autodesk) |
---|---|---|---|
Type | Standard ouvert, neutre | Standard ouvert, géospatial | Format propriétaire, optimisé |
Contenu Principal | Points (XYZ, RVB, Intensité), Panoramas 360°, Métadonnées | Points (XYZ, Intensité), Classification, Attributs LiDAR | Points indexés, structure de projet |
Meilleur Cas d'Usage | Archivage, interopérabilité, projets multi-logiciels, patrimoine | Topographie, SIG, génie civil, analyse territoriale | Modélisation dans l'écosystème Autodesk (Revit, AutoCAD) |
Avantage Principal | Universalité et richesse des données (images) | Standard de la cartographie, classification des points, compression (.laz) | Performance et fluidité dans les logiciels Autodesk |
Inconvénient Principal | Fichiers potentiellement volumineux | Moins riche en métadonnées de scan que le .e57 | Verrouillage dans l'écosystème Autodesk |
Logiciels Cibles | Tous les logiciels de traitement de nuages de points (ReCap, RealWorks, CloudCompare...) | Logiciels SIG (QGIS, ArcGIS), logiciels de génie civil (Civil 3D) | Revit, AutoCAD, Navisworks, ReCap |
Le Cœur du Réacteur – Les Maquettes Numériques BIM
Définir l’Attendu : Le Cadre des Niveaux de Développement (LOD)
Avant même de parler de format de fichier, la discussion avec le client doit porter sur le niveau de développement (LOD) attendu pour la maquette BIM. Le LOD est une spécification qui définit le degré de maturité, de fiabilité et la quantité d’informations contenues dans chaque élément du modèle, tant sur le plan de la géométrie que des données non graphiques qui y sont attachées.
Il est crucial de distinguer le Level of Development (Niveau de Développement) du Level of Detail (Niveau de Détail). Le second se réfère uniquement à la complexité visuelle et géométrique d’un objet, tandis que le premier, le LOD, est un concept contractuel bien plus complet qui englobe la fiabilité de l’information (par exemple, un mur n’est plus un simple volume, mais un objet avec des propriétés de matériaux, une fonction portante, une résistance au feu, etc.).
Dans un contexte de Scan to BIM, les niveaux de LOD se traduisent ainsi :
LOD 200 (Géométrie Approximative) : Les éléments (murs, dalles, poteaux) sont modélisés comme des formes génériques. Leur position, taille et forme sont approximatives. Ce niveau est suffisant pour des études de faisabilité, des analyses de surfaces ou des simulations d’implantation de mobilier.
LOD 300 (Géométrie Précise) : Les éléments sont modélisés avec des dimensions, une forme, une position et une orientation précises, fidèles à la réalité scannée. Les objets ne sont pas encore des produits de fabricants spécifiques, mais leur géométrie est exacte. C’est le niveau standard pour la production de documents de construction (plans, coupes, élévations) et les projets de rénovation architecturale.
LOD 350 (Coordination) : Ce niveau ajoute à la géométrie précise du LOD 300 les détails sur les interfaces et les connexions entre les différents éléments. Il est essentiel pour la coordination entre les lots techniques (Structure, CVC, Plomberie) et la détection de conflits (clash detection).
LOD 400 (Fabrication) : Le modèle intègre des détails spécifiques à la fabrication et à l’assemblage. Les objets ne sont plus génériques mais représentent des produits réels de fabricants, avec leurs informations techniques. Ce niveau est utilisé pour la préfabrication d’éléments.
LOD 500 (Tel que Construit / As-Built) : Le modèle est une représentation vérifiée sur le terrain de l’état final du bâtiment. Il est enrichi des informations nécessaires à l’exploitation et à la maintenance : modèle et fabricant de l’équipement, date d’installation, manuels techniques, garanties, etc. C’est la fondation du jumeau numérique opérationnel.
Le LOD n’est pas un simple curseur de qualité à pousser au maximum, mais un outil de planification et de gestion des risques. Chaque niveau a un coût et un objectif. Demander un LOD 400 pour l’ensemble d’un projet de rénovation serait un gaspillage de ressources. Le rôle du consultant est d’aider le client à définir le LOD requis pour chaque usage de la maquette (par exemple, LOD 350 pour la structure, LOD 300 pour l’enveloppe, LOD 200 pour le mobilier). Cette discussion, formalisée dans une Charte BIM, permet d’aligner parfaitement les attentes du client, le budget et les livrables, prévenant ainsi les litiges.
Tableau 2 : Application des LOD dans un Contexte Scan-to-BIM
LOD | Description Géométrique (Scan-to-BIM) | Informations Non-Graphiques | Cas d'Usage Typique | Coût / Effort |
---|---|---|---|---|
LOD 200 | Volumes génériques, position et taille approximatives | Aucune ou basique (surface, volume) | Étude de faisabilité, plan de masse, simulation d'implantation | Faible |
LOD 300 | Géométrie précise et spécifique, fidèle au nuage de points | Type de matériau, fonction (porteur/non-porteur) | Plans de rénovation, métrés, coordination de base | Moyen |
LOD 350 | Géométrie précise + interfaces et connexions entre objets | Informations de coordination, dégagements requis | Détection de clashs avancée, coordination des lots techniques | Élevé |
LOD 400 | Détails de fabrication et d'assemblage | Informations fabricant, modèle, références produit | Préfabrication, commande de composants sur mesure | Très Élevé |
LOD 500 | Modèle vérifié "Tel que Construit" | Données de maintenance, garanties, date d'installation | Gestion et exploitation du bâtiment (GMAO), jumeau numérique | Variable |
L’Écosystème Natif : La Maquette.rvt (Autodesk Revit)
Le format .rvt
est le format de fichier de projet natif et propriétaire du logiciel Autodesk Revit. Il constitue le cœur d’un projet BIM mené dans cet environnement. Il contient l’intégralité des données : le modèle 3D, les annotations 2D, les métadonnées, les familles d’objets paramétriques, les vues, les nomenclatures, les feuilles de plan, etc..
Avantages Clés :
Fidélité et Intégrité Totales : En tant que format de travail natif, il n’y a aucune perte de données, de fonctionnalité ou de paramétrie tant que l’on reste dans l’environnement Revit. C’est la représentation la plus riche et la plus complète du projet.
Workflow Intégré et Efficace : Il est parfaitement adapté aux équipes qui utilisent Revit pour l’ensemble du processus, de la conception à la production des documents de construction.
Inconvénients :
Interopérabilité Nulle : C’est une « boîte noire ». Il est impossible d’ouvrir directement un fichier
.rvt
avec un logiciel concurrent comme ArchiCAD, Allplan ou Tekla. L’échange de données nécessite un export, généralement au format IFC, qui peut entraîner une perte d’informations.Absence de Rétrocompatibilité : Un fichier
.rvt
enregistré avec une version de Revit (par exemple, 2025) ne peut pas être ouvert par une version antérieure (par exemple, 2024). Cette contrainte peut poser des problèmes de collaboration importants au sein d’équipes n’utilisant pas la même version du logiciel.
Destinataires : Architectes, ingénieurs et bureaux d’études qui ont standardisé leurs processus de travail sur Autodesk Revit.
Le Standard d’Échange Ouvert : La Maquette.ifc (buildingSMART)
Le format IFC (Industry Foundation Classes) est un format de données ouvert, neutre et standardisé au niveau international (ISO 16739), développé et maintenu par buildingSMART. Son objectif premier est de permettre l’interopérabilité, c’est-à-dire l’échange de données BIM fiables entre différentes applications logicielles, quels que soient leurs éditeurs. L’IFC n’est pas qu’un simple format de fichier (le plus courant étant
.ifc
, basé sur la norme STEP), c’est avant tout un schéma de données qui définit une structure pour les objets du bâtiment, leurs propriétés et leurs relations.
Avantages Clés :
Interopérabilité : C’est sa raison d’être. Il permet à un architecte travaillant sur ArchiCAD de collaborer avec un ingénieur structure sur Tekla et un ingénieur CVC sur Revit, en échangeant des modèles compréhensibles par tous.
Standard Ouvert et Pérennité : Il garantit l’accès aux données et leur pérennité sur le long terme, indépendamment de la politique commerciale des éditeurs de logiciels. C’est le format d’archive par excellence pour les données BIM et une exigence fréquente des maîtres d’ouvrage publics.
Inconvénients et Nuances :
Qualité de l’Échange Variable : Un export/import IFC n’est pas un processus magique. Sa qualité dépend de la rigueur de l’implémentation du standard par chaque éditeur de logiciel. Des informations, notamment la paramétrie complexe des objets ou l’historique de modélisation, peuvent être perdues ou mal interprétées.
Nécessité de Spécification : Il ne suffit pas de demander « un IFC ». Il faut impérativement préciser la version du schéma (par exemple, IFC2x3 ou IFC4) et la vue de modèle (MVD – Model View Definition), qui est un sous-ensemble du schéma destiné à un cas d’usage spécifique (ex:
Coordination View 2.0
pour la détection de clashs).
Focus sur IFC2x3 vs. IFC4 :
IFC2x3 (2006) : C’est la version la plus ancienne mais encore la plus largement supportée et la plus robuste en termes de compatibilité logicielle. Elle est très fiable pour les cas d’usage de coordination géométrique de base.
IFC4 (2013 et évolutions) : C’est une mise à jour majeure qui apporte de nombreuses améliorations : un meilleur support pour les géométries complexes (surfaces courbes), de nouvelles entités pour les infrastructures (routes, ponts), et des structures de données plus riches pour les analyses avancées (énergétiques, environnementales). Son adoption par les logiciels est croissante mais pas encore aussi universelle que celle de l’IFC2x3.
Destinataires : Projets collaboratifs impliquant plusieurs logiciels, maîtres d’ouvrage (notamment publics) exigeant des formats ouverts pour l’archivage, workflows d’analyse spécialisés (thermique, structurelle, etc.).
Synthèse Stratégique : Le Dilemme.rvt vs..ifc – Une Matrice de Décision Client
Le choix entre un format natif .rvt
et un format ouvert .ifc
reflète la philosophie de collaboration et de gestion des données du client. Un client qui privilégie un écosystème contrôlé et homogène, souvent pour des raisons d’efficacité interne, optera pour le .rvt
. À l’inverse, un maître d’ouvrage qui doit garantir l’ouverture à la concurrence, la flexibilité de ses partenaires et la pérennité de ses archives exigera un .ifc
comme livrable contractuel.
Le rôle du consultant n’est pas d’imposer un format, mais d’éclairer le client sur ces implications stratégiques. La question fondamentale à poser est : « Quelle est votre politique de collaboration et de gestion de vos actifs numériques à long terme? ».
Souvent, la solution la plus robuste est hybride : permettre aux équipes de travailler en format natif (.rvt
) pendant la phase de production pour maximiser leur efficacité, tout en exigeant la livraison d’un fichier .ifc
qualifié (version et MVD spécifiés dans la Charte BIM) comme livrable final, contractuel et d’archive.
Tableau 3 : Comparaison Stratégique des Formats BIM (.rvt vs..ifc)
Critère | Format .rvt (Autodesk Revit) | Format .ifc (buildingSMART) |
---|---|---|
Fidélité des Données | Maximale. Aucune perte d'information dans son environnement natif. | Bonne à excellente, mais risque de perte de paramétrie ou de données spécifiques au logiciel lors de l'export/import. |
Interopérabilité | Nulle. Format fermé à l'écosystème Autodesk. | Élevée. Conçu pour la collaboration entre différents logiciels BIM. |
Performance | Optimale dans Revit et les logiciels Autodesk compatibles. | Dépend de la qualité de l'importateur du logiciel récepteur. Peut être plus lent sur des modèles très complexes. |
Pérennité / Archivage | Faible. Dépend de la pérennité d'Autodesk et de la gestion des versions (pas de rétrocompatibilité). | Maximale. Standard ISO ouvert garantissant l'accès aux données à très long terme. |
Dépendance Fournisseur | Totale. Lie le client et ses données à l'éditeur Autodesk. | Nulle. Le client est libre de choisir ses outils logiciels dans le temps. |
Complexité de Gestion | Simple (un seul fichier de projet). | Plus complexe (nécessite de spécifier version, MVD, et de valider la qualité des échanges). |
Les Livrables Spécialisés et de Transition
Les Plans 2D : Un Standard Indémodable
Malgré l’hégémonie du BIM, les plans 2D (plans, coupes, élévations) restent un livrable indispensable. Ils sont universellement compris, faciles à diffuser et constituent le langage commun sur un chantier. La valeur ajoutée du processus Scan-to-BIM est que ces plans sont extraits directement de la maquette 3D, source de vérité unique, garantissant ainsi une cohérence parfaite entre tous les documents du projet.
.dwg
(AutoCAD) : Le format propriétaire d’Autodesk est le standard de facto pour la CAO 2D/3D. C’est un livrable incontournable pour la quasi-totalité des acteurs du bâtiment (architectes, bureaux d’études, artisans). Il faut rester vigilant aux problèmes de compatibilité entre les différentes versions du format..dgn
(MicroStation) : Format natif de Bentley Systems, le.dgn
est le concurrent direct du.dwg
, principalement utilisé dans les grands projets d’infrastructures (routes, ponts, usines, réseaux). Il est essentiel de le fournir si l’écosystème du client est basé sur MicroStation..pdf
(Portable Document Format) : Format universel de consultation et d’impression, le PDF garantit la préservation de la mise en page quel que soit le support. Il est idéal pour la transmission de documents officiels (permis de construire), les rapports, et la communication avec des intervenants non-techniques. Pour l’archivage à long terme, la normePDF/A (ISO 19005) assure la lisibilité future du document en intégrant toutes les informations nécessaires (polices, couleurs) dans le fichier.
Les Maillages 3D pour la Visualisation et le Prototypage
Un maillage (mesh) est une représentation de la surface d’un objet composée de polygones (généralement des triangles). C’est un format plus simple et plus léger qu’une maquette BIM, axé sur la géométrie de surface et idéal pour la visualisation.
.obj
(Wavefront) : Format ouvert et très polyvalent, sa grande force est de pouvoir stocker, en plus de la géométrie, des informations de couleurs et de textures complexes via un fichier compagnon.mtl
. Il est donc le format de choix pour créer des rendus photoréalistes, des visualisations pour le marketing, ou pour une utilisation dans des moteurs de jeu (réalité virtuelle/augmentée)..stl
(Stereolithography) : Le standard historique de l’impression 3D. Il ne décrit que la géométrie de surface via un maillage de triangles, sans aucune information de couleur ou de texture. Plus simple et souvent plus léger que l’OBJ, il est destiné à la fabrication de maquettes physiques.
Destinataires : Agences de communication et de marketing, promoteurs immobiliers, services de prototypage rapide, et tout client souhaitant des supports visuels percutants ou des maquettes physiques.
La Rétro-ingénierie pour la Fabrication
Le Scan to BIM ne se limite pas au bâtiment. Une de ses applications les plus puissantes est la rétro-ingénierie de pièces mécaniques ou d’équipements industriels. Le processus consiste à capturer la géométrie d’un objet existant avec une très haute précision pour la recréer dans un logiciel de CAO, souvent dans le but de la refabriquer.
.stp
/.step
(Standard for the Exchange of Product data) : C’est le standard ISO moderne (ISO 10303) pour l’échange de données de produits 3D. Sa supériorité sur les anciens formats vient de sa capacité à décrire des modèles « solides » (pleins) et non de simples surfaces. Il conserve la topologie de l’objet, ce qui le rend plus fiable, plus facile à éditer et plus riche en informations (tolérances, matériaux). C’est le format de prédilection pour l’ingénierie mécanique et l’import dans les logiciels de FAO (Fabrication Assistée par Ordinateur) pour l’usinage CNC..igs
/.iges
(Initial Graphics Exchange Specification) : Un standard plus ancien, développé dans les années 70, qui décrit principalement la géométrie sous forme de surfaces. Il est moins fiable que le STEP (risques de trous, de surfaces manquantes) et moins riche en informations, mais reste utilisé pour des raisons de compatibilité avec des logiciels ou des machines plus anciens..dxf
(Drawing Exchange Format) : Format d’échange texte d’Autodesk, il peut contenir de la 3D mais est surtout utilisé pour exporter des contours 2D précis. Il est parfait pour des applications de fabrication 2D comme la découpe laser, jet d’eau ou plasma.
Destinataires : Ingénieurs industriels, bureaux d’études mécaniques, ateliers de fabrication, services de maintenance pour la refabrication de pièces de rechange.
Les Livrables d'Expérience et d'Assurance Qualité
L’Exploration Immersive : Les Visites Virtuelles
Une visite virtuelle est un assemblage de panoramas 360° (issus directement des scans ou de rendus de la maquette BIM) qui permet une exploration immersive et interactive d’un espace à distance. C’est un puissant outil de communication, de collaboration et de gestion. Le choix entre une solution en ligne ou hors ligne est une décision stratégique cruciale.
Visite Virtuelle en Ligne (Online) :
Description : Hébergée sur un serveur web et accessible via un simple lien internet.
Avantages : Accessibilité maximale pour une large audience, gain de temps considérable en réduisant les visites physiques, mise en valeur du bien.
Inconvénients : Dépendance à une connexion internet, et surtout, préoccupations majeures en matière de sécurité des données.
Destinataires : Promoteurs immobiliers, agences de location, secteur du tourisme, communication grand public.
Visite Virtuelle Hors Ligne (Offline) :
Description : Livrée sous forme d’une application autonome sur un support physique (clé USB, tablette, ordinateur) qui ne nécessite aucune connexion internet pour fonctionner.
Avantages : Sécurité maximale des données. En éliminant toute connexion à un serveur externe, les risques de piratage, d’intrusion ou de fuite d’informations sensibles sont nuls. L’accès est parfaitement contrôlé et la fiabilité est totale, même dans des zones sans réseau.
Inconvénients : Diffusion plus restreinte, nécessite un support physique.
Destinataires : Sites industriels, sites sensibles (défense, énergie, data centers), projets confidentiels, formation du personnel technique en interne, planification d’interventions de maintenance dans des environnements sécurisés.
Pour les clients industriels ou institutionnels où la confidentialité est un enjeu critique, la visite virtuelle en ligne est souvent inacceptable. Proposer une solution offline n’est pas une contrainte, mais une réponse à haute valeur ajoutée à un besoin fondamental de sécurité. C’est une marque d’expertise qui différencie le consultant.
Le Contrat de Confiance : La Charte BIM et le Rapport Qualité
Ces deux documents ne sont pas de simples formalités administratives ; ils constituent le fondement de la confiance entre le prestataire et son client.
La Charte BIM (ou Convention BIM) :
Description : C’est le document contractuel qui établit les « règles du jeu » du projet BIM. Elle définit les objectifs du client, les rôles et responsabilités de chaque acteur, les processus de collaboration, les standards à respecter (nommage des fichiers, structuration du modèle) et la liste précise des livrables attendus, y compris les niveaux de LOD pour chaque lot.
Rôle pour le Client : C’est sa police d’assurance. Elle garantit que les livrables seront conformes à ses attentes et exploitables pour les usages prévus. Elle clarifie les attentes et réduit drastiquement les risques de malentendus, d’erreurs et de surcoûts.
Rôle pour le Consultant : C’est un outil de clarification et de protection. En la rédigeant avec le client, le consultant s’assure que les objectifs sont compris, réalistes, et il formalise le périmètre exact de sa mission.
Le Rapport Qualité / Rapport de Contrôle :
Description : C’est la preuve tangible que le travail livré est conforme aux exigences de précision et de qualité définies dans la Charte BIM. Dans un projet Scan-to-BIM, il doit démontrer la fidélité de la maquette modélisée par rapport au nuage de points capturé.
Contenu Typique : Il inclut généralement le rapport de recalage des scans (qui atteste de la précision de l’assemblage), des analyses d’écarts entre le modèle et le nuage (souvent sous forme de « cartes de chaleur » colorées montrant les déviations en tout point), et une checklist de conformité aux exigences de la Charte BIM (respect des LOD, de la structuration, etc.).
Rôle Stratégique : Pour le client, c’est la preuve objective qu’il a reçu la qualité pour laquelle il a payé. Pour le consultant, c’est l’acte final qui valide son travail, justifie son paiement et le protège contre d’éventuelles réclamations futures sur la précision du modèle. Proposer proactivement un rapport qualité n’est pas une contrainte, mais un gage de professionnalisme et de transparence qui bâtit une relation de confiance durable.
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Conclusion : Le Guide du Consultant – Cartographie des Livrables par Profil Client
Il n’existe pas de « meilleur » livrable universel. La véritable expertise d’un consultant en Scan to BIM réside dans sa capacité à écouter et à comprendre les besoins métier de son client pour assembler un « paquet de livrables » sur mesure, combinant plusieurs formats pour répondre à des objectifs multiples et parfois contradictoires. Le consultant expert ne vend pas des fichiers, il conçoit des solutions. La matrice suivante sert de guide pour construire ces offres de valeur personnalisées.
Tableau 4 : Matrice de Recommandation des Livrables par Profil Client
Critère | Format .rvt (Autodesk Revit) | Format .ifc (buildingSMART) |
---|---|---|
Fidélité des Données | Maximale. Aucune perte d'information dans son environnement natif. | Bonne à excellente, mais risque de perte de paramétrie ou de données spécifiques au logiciel lors de l'export/import. |
Interopérabilité | Nulle. Format fermé à l'écosystème Autodesk. | Élevée. Conçu pour la collaboration entre différents logiciels BIM. |
Performance | Optimale dans Revit et les logiciels Autodesk compatibles. | Dépend de la qualité de l'importateur du logiciel récepteur. Peut être plus lent sur des modèles très complexes. |
Pérennité / Archivage | Faible. Dépend de la pérennité d'Autodesk et de la gestion des versions (pas de rétrocompatibilité). | Maximale. Standard ISO ouvert garantissant l'accès aux données à très long terme. |
Dépendance Fournisseur | Totale. Lie le client et ses données à l'éditeur Autodesk. | Nulle. Le client est libre de choisir ses outils logiciels dans le temps. |
Complexité de Gestion | Simple (un seul fichier de projet). | Plus complexe (nécessite de spécifier version, MVD, et de valider la qualité des échanges). |